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Un millésime c’est une année. Voilà, tout simplement. Il indique l’année de la récolte du raisin ayant servi à faire le vin dans la bouteille. Le millésime nous donne la date des vendanges effectuées et donc l’âge du vin. Je vous en dis un peu plus sur cette notion simple et complexe à la fois.
Est-ce que tous les vins sont millésimés ?
Si l’on se concentre sur le cas de la France, la plupart des vins sont millésimés, avec évidemment quelques exceptions. Les vins d’appellation ou indication d’origine contrôlée doivent obligatoirement être millésimés. Mais il existe une tolérance légale permettant l'ajout de 15 % de vin de l'année précédente (au maximum).
Les exceptions :
Certaines catégories sortent du lot et sont régies par une législation plus souple au niveau de l’indication du millésime.
Les vins de France : Aucune obligation d’indiquer le millésime. Les producteurs peuvent faire le choix d’assembler plusieurs années si bon leur semble.
Les vins effervescents : Les champagnes, crémants et autres types d’effervescents n’ont pas d’obligation à être produits avec les vins d’une seule et même année. Les producteurs assemblent alors les vins d’années précédentes, appelés vins de réserve. Lorsque les effervescents sont le résultat d’une seule année de récolte, alors vous verrez souvent la mention du millésime.
D’autres vins n’entrent pas dans l’obligation de millésime : les vins mutés autrement appelés vins doux naturels, les vins issus de réserve perpétuelle (solera), ou encore les vins de liqueur comme le Pineau-des-Charentes ou le Macvin-du-Jura.
La question à 100 balles : y a-t-il des bons et des mauvais millésimes ?
L’envie est grande de vous passer un extrait du sketch des inconnus “Le bon et le mauvais chasseur”*, mais je vous évite cet aparté.
*Ndlr : ceci est est une référence de personne née avant les années 2000
On entend souvent parler de bons ou de mauvais millésimes. En réalité il s’agit plus de millésimes compliqués / difficiles vs millésimes bien plus cléments.
Mais la différenciation se fera plus sur la capacité de garde potentielle et la structure du vin, que sur sa qualité intrinsèque.
Un millésime difficile pourra être un magnifique vin à déguster sur la jeunesse là ou certains « grands millésimes » doivent attendre plusieurs années avant de se révéler. Tout dépendra de ce que fera le viticulteur à partir de sa matière première.
Je m’explique. La notion de bon ou de mauvais réfère au climat de l’année.
Si l’année a été difficile, par exemple très fraîche, avec beaucoup de pluie, et donc des difficultés de maturité ou des pressions de maladie de la vigne, il se peut que les vignerons soient obligés de récolter plus tôt que d'habitude, ou en tout cas avec une maturité pas tout à fait comme escomptée.
Les raisins peuvent s’en trouver plus acides, avec une maturité phénolique qui n’est pas arrivée à terme, et donc une faible concentration de couleur, de tanin et d’arôme.
Dans ce cas, il y a des chances que ce ne soit pas une année avec un grand potentiel de garde, surtout pour les rouges, car il y aura peu de tanin à extraire. Ou en tout cas, il serait souhaitable de ne pas chercher à trop en extraire, sous peine d’obtenir un vin déséquilibré.
La maturité phénolique (couleur, tanin, arôme) est à dissocier de la maturité physiologique (acidité /sucre). Pour obtenir une parfaite maturité, il faut que la courbe des deux se croise, pour un équilibre global. Sinon, de façon assez logique, si la récolte se fait au moment ou l’une, l’autre ou encore les deux maturités ne sont pas atteintes, ou à contrario, dépassées, les raisins n'exprimeront pas les mêmes structures / goûts / potentiels.
La réponse est ici : il est important de respecter la matière première telle que l’année la propose. Si le raisin est peu concentré, on peut imaginer un vin plutôt bon à boire sur la jeunesse, avec des arômes primaires subtils. En revanche si l’année a permis de parfaites maturités, que la pluie n’a été ni trop abondante, ni trop absente, alors il y a des chances pour que les planètes soient alignées pour produire un vin avec une grande structure, avec plus d’extraction possible d’éléments permettant une longue garde.
Qu’est-ce qui fait un grand millésime?
C’est donc, on l’aura compris, le climat qui fait un bon millésime ou non.
Mais répondre à cette question est aussi complexe et subjectif que d’essayer de définir ce qui fait un bon plat.
Tout dépend de quel point de vue on se place.
- Point de vue cavistes / restaurateurs (avec pas ou peu de capacité de stock) : Un grand millésime est un millésime qui permet d’être bu / vendu tout suite.
- Point de vue consommateur : Un grand millésime est un vin qui aura une grande capacité de garde et que l’on pourra faire vieillir de longues années.
- Point de vue vigneron : un grand millésime c’est lorsque les récoltes ont permis de faire du volume ET de la qualité. Si vous avez un excellent vin mais à peine 1000 bouteilles, le vigneron aura du mal à parler de grand millésime.
L’année 2024 est un bon exemple. Dans une grande partie de la France, les conditions ont été très compliquées (pluie, maladie fongique dans la vigne), beaucoup ont perdu un pourcentage important de récolte. En revanche, le tri des raisins très serré a été la norme dans beaucoup de domaines. On aura donc chez pas mal de producteurs des vins de très bonne qualité mais avec de minuscules rendements. Impossible, il me semble, d'appeler ça un bon millésime, vous en conviendrez. Surtout si comme moi vous avez vécu des incidents en direct de chez le vigneron où, en une soirée seulement, entre l’apéro et le dessert, vos amis perdent 45% de leur récolte à cause d’un orage de grêle. Récolte par ailleurs déjà bien réduite par le mildiou des semaines précédentes.
Bon ou mauvais millésime c’est comme tout, ça dépend de quel point de vue on se place.
Je vous propose régulièrement de dresser le portrait d’un millésime. Ses contours, ses tendances par région viticole, ses atouts et ses problématiques. Histoire de vous aider à vous repérer un peu plus facilement dans tous ces chiffres.
Leslie Brochot